Nunc est ludendum! C’est maintenant qu’il faut jouer

Enseignante de français et de langues anciennes, membre du comité de l’association Nunc et chroniqueuse pour des sites d’associations antiquisantes, Julie Wojciechowski publie Sous le soleil de Pompéi à La Vie des Classiques, le label pédagogique des Belles Lettres. Une découverte du latin doublée d’une immersion dans la vie quotidienne antique.

Nunc.ch: Quels objectifs vises-tu à travers la rédaction de ce cahier?

J.W.: Il me tenait à cœur de montrer une langue vivace, pour ne pas dire vivante, celle de ses habitants. Celle qui a servi à commander un repas dans une taverne, à soutenir un allié politique, à encourager son gladiateur favori, à draguer, à s’insulter de noms d’oiseaux…

En côtoyant Lucius, un passant amateur de thermes, Sabina, la servante du Poète tragique, Salvius, un mordu de gladiature, Julia Felix, une femme d’affaires, un magister et d’autres personnages librement inspirés d’habitants de Pompéi, on devient le héros de ce parcours dans la ville. Et pour mieux appréhender leur quotidien, j’ai dessiné des objets, des monuments, des graffitis, des fresques. Aussi souhaitais-je donner à voir au lecteur ce qu’on ne peut pas forcément voir sur site, puisque certaines œuvres se trouvent au Musée de Naples et que les murs sont à reconstruire par l’imagination.

J’ai tenté une approche complète, par tous des sens: d’après les anecdotes rapportées par les auteurs latins, on entend les voisins du maître d’école qui regrettent de ne pas pouvoir faire la grasse matinée, les bruits truculents des épilations et autres activités dans les thermes et des joueurs irréconciliables dans la taverne, on appréhende de nouvelles saveurs comme celle du célèbre garum et l’on tente de reproduire des recettes antiques chez soi, on manipule la monnaie et les chiffres.

En se laissant porter par ce parcours dans les rues de Pompéi –et en jouant, on partage une tranche de vie et l’on cerne un peu mieux l’esprit et même l’humour de ces hommes et ces femmes qui ont vécu avant nous.

A qui s’adresse-t-il?

J.W. : Autant aux curieux qui n’ont jamais fait de latin qu’aux nostalgiques qui veulent s’y remettre, mais aussi aux familles. Comme pour Chez les dieux de l’Olympe (paru en 2024), j’imagine un ouvrage qui a sa place au milieu du foyer: les plus jeunes peuvent colorier les fresques ou jouer aux jeux romains avec des noix, pendant que les plus grands déchiffrent les graffitis électoraux. Les témoignages de lecteurs, qui m’ont rapporté comment le cahier avait permis de créer du lien autour de la découverte culturelle et des moments de partage en famille, m’ont particulièrement émue. J’ai aussi eu des retours de collègues qui utilisent les cahiers de vacances en classe pour varier les approches du cours de grec pour le premier, de latin pour cet opus, aussi pour préparer leur voyage scolaire!

Pourquoi avoir choisi Pompéi?

J.W. : Pompéi, c’est un instantané de la vie romaine, une vie figée dans le temps. J’avais envie de faire fouler les rues de la ville au lecteur et de créer un parcours de réalité «augmentée» grâce à la reconstitution, à l’imagination aussi! Paradoxalement, c’est aussi un cimetière… Mais ici, c’est la vie que j’ai choisi de montrer, on est du côté des vivants.

Et Pompéi fascine: tout le monde connaît l’histoire de l’éruption du Vésuve. C’est une source qui semble inépuisable, des trésors restent à découvrir, c’est d’ailleurs sur cette note que je conclus l’ouvrage (peut-être une suite?).

On a un peu l’impression que le cahier pourrait se décliner comme «une semaine à Pompéi». Juste ?

J.W. : Exactement! Chaque chapitre correspond à une journée de la semaine, de Saturni dies à Veneris dies, et chaque journée explore un aspect différent de la ville. On commence par l’arrivée au forum un jour de marché – le samedi à Pompéi, on passe par les thermes, la taverne, la caserne des gladiateurs… C’est un véritable parcours ludique qui suit la logique d’un séjour touristique, mais en l’an 70 de notre ère. Tout un programme de vacances!

La vie quotidienne est très présente dans ce cahier, notamment tout ce qui concerne l’alimentation. Pour toi, c’est une manière de rendre cette matière plus attractive?

J.W. : Les lecteurs de Nunc.ch le savent bien, autour de la nourriture cristallise tout un ensemble de domaines et de questionnements. Quels sont les lieux de restaurations? Les habitudes culinaires, l’organisation des repas et des journées sont-elles les mêmes aujourd’hui?

Et puis, nous sommes tous concernés par la nourriture: c’est un point d’entrée universel dans une culture, n’est-ce pas?

C’est toujours plus motivant de découvrir en contexte. Autour de la table, on parle, on joue, on se chamaille, on partage… C’est ainsi qu’énormément de mot latins sont rencontrés tout au long du cahier, un peu plus de 400.

D’ailleurs, un latiniste pourrait parfaitement lire ce cahier en zappant tous les exercices et il aurait appris plein de choses. Au-delà de la langue latine, tu souhaites faire connaître une culture ancestrale?

J.W. : C’est vrai que l’originalité de ce cahier est qu’il suit un scénario, c’est une courte histoire, un concentré de civilisation, dans le temps et dans l’espace. J’ai pris soin d’introduire tous les chapitres et tous les jeux: c’est le fil directeur. J’ai ajouté quasiment systématiquement des encadrés «Le saviez-vous?» qui apportent des précisions, des anecdotes ou des éléments d’étymologie  – parce qu’il ne faut pas oublier que l’intérêt de côtoyer les langues anciennes est aussi de mieux connaître notre langue!

Comment faire pour se le procurer ?

J.W. : Sous le soleil de Pompéi est disponible en librairie depuis le 6 juin. On peut aussi le commander directement sur le site des Belles Lettres ou chez tous les libraires en ligne. J’espère qu’il ravira les lecteurs de Nunc.ch.


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