Ludi Apollinares

Cet événement se répète

202506juilToute la journée13Repeating EventLudi ApollinaresType:Fête romaine

Description

Pridie Nonas Iulias – Ante diem tertium Idus Iulias

Denier de Lucius Calpurnius Piso Frugi, 90 avant notre ère. Avers: tête laureée d’Apollon à droite. Revers: cavalier acrobate (desultor) galopant à droite, tenant une palme. Cette monnaie fait référence aux Ludi Apollinares dont un ancêtre du monétaire avait obtenu le renouvellement perpétuel en 211 avant notre ère.

EN BREF. Créés en pleine guerre contre Hannibal après consultation d’oracles, les Ludi Apollinares débutent en 212 avant notre ère par une seule journée de spectacles. Ces jeux en l’honneur d’Apollon s’étendent progressivement sur neuf jours en juillet. Contrairement aux autres fêtes romaines, ils mélangent rites grecs et traditions latines. Au 1er siècle avant notre ère, ils deviennent un théâtre de contestation politique où les acteurs critiquent les dirigeants. L’empereur Septime Sévère les célèbre encore au 3e siècle après notre ère.

Les Ludi Apollinares: une fête romaine née de la guerre

En 212 avant notre ère, Rome traverse une période dramatique. Hannibal et ses troupes carthaginoises ravagent l’Italie depuis plusieurs années. La défaite de Cannes, en 216, a coûté la vie à des dizaines de milliers de soldats romains. Face à cette situation désespérée, le Sénat romain décide de consulter des textes prophétiques.

Tite-Live (XXV, 12) et Macrobe (Saturnales, I, 17) racontent que les sénateurs font examiner un recueil de prédictions, qui avait été récemment découvert à Rome, les Carmina Marciana. Une prophétie attire leur attention:

«Romains, si vous voulez chasser l’ennemi et le fléau qui vous arrive des extrémités de l’univers, je vous engage à vouer à Apollon des jeux que vous célébrerez pieusement chaque année, en partie aux frais du public, en partie aux frais des particuliers. Faites présider à la célébration de ces jeux le préteur qui sera chargé de rendre la justice à toutes les classes du peuple.»

Pour confirmer cette révélation, les autorités consultent également les Livres sibyllins, collection officielle de prophéties conservée au Capitole. Les deux sources donnent la même réponse: il faut organiser des jeux en l’honneur d’Apollon.

La première célébration

Le Sénat vote aussitôt les crédits nécessaires. Tite-Live précise que «le préteur urbain recevrait pour ces jeux une somme de 12 000 as». En 212, ces premiers Ludi Apollinares sont organisés par le préteur urbain Publius Cornelius Sylla, comme l’indique Tite-Live dans ses Periochae (25.3).

Ces jeux comprennent «des jeux scéniques et des jeux de cirque dans le cirque Maxime». L’historien romain décrit l’atmosphère de cette première édition: «Le peuple y assista couronné, les mères de famille firent des supplications; on festoya en public, portes ouvertes, dans les cours des maisons, et on fêta ce jour par toutes sortes de cérémonies.» Chaque spectateur doit porter une couronne de laurier et faire une offrande personnelle à Apollon.

Une institutionnalisation en deux temps

Les premières années, les Ludi Apollinares n’ont pas de date fixe. Tite-Live explique que «dès lors, tous les préteurs urbains suivants les organisèrent; mais ils prenaient l’engagement pour une seule année et les célébraient à un jour indéterminé» (Inde omnes deinceps pretores urbani facerunt; sed in unum annum vovebant dieque incerta faciebant).

La première étape de stabilisation intervient en 211 avant notre ère, quand le Sénat accepte la proposition du préteur Gaius Calpurnius Piso de rendre ces jeux définitivement annuels.

L’étape décisive a lieu en 208 avant notre ère. Une épidémie frappe Rome et ses environs. Le préteur urbain Publius Licinius Varus fait voter par le peuple une loi qui fixe les jeux «pour l’éternité à une date fixe». Selon Tite-Live (XXVII, 23), «Publio Licinio Varo, préteur urbain, fut le premier à établir et organiser ainsi les jeux» (P. Licinius Varus, praetor urbanus […] ita vovit fecitque primus). La date choisie est le 13 juillet.

L’extension des festivités

Au départ, les Ludi Apollinares ne durent qu’une journée. Mais leur succès entraîne un allongement progressif. En 190 avant notre ère, Tite-Live (XXXVII, 4) mentionne qu’ils occupent «le cinquième jour avant les ides de juillet», ce qui prouve qu’ils durent alors au moins trois jours, du 11 au 13 juillet.

Les calendriers gravés sur pierre à l’époque d’Auguste montrent que les jeux s’étalent désormais du 6 au 13 juillet, soit huit jours. Le calendrier de Filocalus (ou Chronographe de 354), rédigé au 4e siècle après notre ère, leur consacre même neuf jours, du 3 au 13 juillet.

La diversification des spectacles

Le contenu des Ludi Apollinares évolue aussi. Tite-Live (XXV, 12) précise qu’en 212 avant notre ère, ils se déroulent «dans le cirque Maxime»: ce sont donc des courses de chars et de chevaux. Mais très vite, d’autres types de spectacles s’ajoutent au programme.

En 169 avant notre ère, des représentations théâtrales sont données pendant les jeux. Cicéron (Brutus, XX) rapporte qu’Ennius, le grand poète romain, «mourut après avoir fait représenter sa tragédie de Thyeste» lors de cette édition. En 60 avant notre ère, «une partie des jeux se passait au théâtre».

À la fin de la République, Cicéron (Lettres à Atticus, IV, 14, 6) évoque aussi des chasses aux animaux sauvages (venationes) organisées pendant les Ludi Apollinares. Il écrit à son ami Atticus: «des jeux magnifiques et réussis; la chasse a été reportée à un autre jour» (Ludi magnifici et grati; uenatio in aliud tempus dilata), montrant que ces spectacles font désormais partie du programme habituel.

L’organisation administrative

Les Ludi Apollinares présentent une particularité administrative. Contrairement aux autres grandes fêtes romaines, confiées aux édiles, ils restent sous l’autorité du préteur urbain. Cette situation s’explique par leur origine votive.

Le prestige attaché à cette charge transparaît dans le monnayage de l’époque. En 90 avant notre ère, Lucius Calpurnius Piso Frugi frappe des pièces représentant Apollon au droit et un cavalier acrobate au revers. Ce choix rappelle probablement les services rendus par son ancêtre, le préteur qui obtint en 211 le renouvellement perpétuel des jeux d’Apollon.

Les rites religieux

Les aspects religieux des Ludi Apollinares suivent des prescriptions précises. La prophétie des Carmina Marciana, rapportée par Macrobe (Saturnales, I, 17), prescrit que «les décemvirs offrent des sacrifices selon le rite grec» (decemviri Graeco ritu hostiis sacra faciant). Cette particularité rituelle distingue le culte d’Apollon: contrairement aux autres divinités romaines, honorées «la tête recouverte d’un pan de la toge», Apollon reçoit des sacrifices selon le mode grec, «la tête découverte».

Macrobe et Tite-Live précisent le détail des offrandes prescrites: «à Apollon un bœuf et deux chèvres blanches ayant les cornes dorées, et à Latone une vache ayant aussi les cornes dorées».

Les jeux comme espace de tensions politiques

Au 1er siècle avant notre ère, les Ludi Apollinares, qui ont lieu en juillet près de la période électorale, deviennent un théâtre d’expression politique. Sylvia Estienne souligne que «pour le 1er s. av. J.-C., nos sources sur les ludi ne privilégient pas forcément la dynamique consensuelle, mais en soulignent au contraire les aspects disruptifs».

En 59, «la foule acclame l’acteur Diphilus pour des vers interprétés comme une critique voilée de Pompée et de ses partenaires du premier triumvirat». En 63 et en 57, «les jeux virent quasiment à l’émeute dans des contextes tendus».

En 44, après l’assassinat de César, les jeux prennent une dimension mémorielle particulière puisqu’ils coïncident avec l’anniversaire de naissance du dictateur défunt, le 12 juillet. Les jeux Apollinaires «deviennent un enjeu de mémoire entre Octavien et Brutus, alors préteur urbain, qui tente désespérément de s’en servir pour reconquérir l’opinion publique». L’impact des représentations théâtrales se mesure «à travers l’importance de la culture théâtrale dans la mémoire populaire».

La pérennité sous l’Empire

Sous l’Empire romain, les Ludi Apollinares conservent leur importance. Les sources indiquent qu’ils «gardent toute leur importance et tout leur éclat» jusqu’à l’époque tardive. Cette longévité témoigne de l’enracinement de cette fête dans la culture romaine.

L’empereur Septime Sévère, au début du 3e siècle après notre ère, montre encore l’actualité du culte apollinien en organisant des Jeux séculaires où Apollon tient une place centrale. Ces grandes célébrations, inspirées des Ludi Apollinares, prouvent la continuité de la dévotion romaine envers le dieu grec.

SOURCES ANTIQUES

  • Cicéron, Brutus, XX.
  • Cicéron, Lettres à Atticus, IV, 14, 6.
  • Macrobe, Saturnales, I, 17: Hostem, Romani, si ex agro expellere vultis, vomicam quae gentium venit longe, Apollini censeo vovendos ludos qui quotannis comiter Apollini fiant. His ludis faciendis praesit is praetor qui ius populo plebique dabit summum: decemviri Graeco ritu hostiis sacra faciant. Hoc si recte facietis, gaudebitis semper fietque res publica melior: nam is divus extinguet perduelles vestros qui vestros campos pascunt placide.
  • Tite-Live, Histoire romaine, XXV, 12 ; XXVII, 23 ; XXXVII, 4.
  • Tite-Live, Periochae, 25, 3.

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Dates

Juillet 6, 2025 - juillet 13, 2025 (Toute la journée)

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