Cet événement se répèteavril 27, 2025
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Ante diem quintum Kalendas Maias - Ante diem sextum Nonas Maias Fresque représentant Flora, provenant de
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Ante diem quintum Kalendas Maias – Ante diem sextum Nonas Maias

EN BREF. Les Floralia, fêtes romaines dédiées à la déesse Flora, mêlaient dévotion religieuse et divertissements populaires. Ces célébrations printanières se distinguaient par leur ambiance libre où prostituées dansaient nues, où l’on portait des vêtements multicolores et où l’on relâchait des animaux symbolisant la fertilité. L’anecdote de Caton quittant le théâtre face aux spectacles licencieux témoigne des tensions morales que suscitait cette fête plébéienne qui connut un immense succès dans tout l’Empire.
Les Floralia, une fête printanière de la Rome antique
Les Floralia ou «Jeux floraux» (ludi Florales) étaient des festivités célébrées dans la Rome antique en l’honneur de Flora, déesse des fleurs, des jardins et du printemps. D’après les textes anciens, cette déesse avait une origine sabine, peuple italique voisin des premiers Romains. Varron, érudit romain du 1er siècle av. J.-C., la compte explicitement parmi les divinités sabines, et note l’existence d’un mois appelé «Flusalis» (équivalent linguistique de Floralia) dans le calendrier sabin.
Les sources historiques indiquent que le culte de Flora fut introduit à Rome par Titus Tatius, roi sabin qui aurait régné conjointement avec Romulus. Selon Ovide, dans ses Fastes, ce culte était déjà établi sous le règne de Numa Pompilius, deuxième roi légendaire de Rome.
La transformation de ce culte en véritable festival public est cependant plus tardive. Pline l’Ancien précise dans son Histoire Naturelle (XVIII.286): «Les Floralia furent instituées l’an 516 de la fondation de Rome [238 av. J.-C.] sur un avis des livres Sibyllins, à cause de la stérilité des campagnes». Cette date est corroborée par l’historien Velleius Paterculus (I.14.8) qui situe l’événement en 241-240 av. J.-C. Ovide ajoute que ces jeux furent ensuite célébrés de manière irrégulière, puis rétablis de façon annuelle en 173 av. J.-C., lorsque les récoltes souffrirent à nouveau «des vents, de la pluie et de la grêle» (Fastes, V.329-330).
Flora: une divinité entre nature et mythe
Flora appartenait au cercle restreint des divinités majeures de Rome, comme l’atteste le fait qu’elle possédait son propre prêtre d’État, le flamen Florialis. Elle recevait des sacrifices dans le bois sacré des Frères Arvales (Fratres Arvales), une confrérie sacerdotale très ancienne.
Ovide, dans ses Fastes, établit un parallèle entre Flora et la nymphe grecque Chloris (V.195-214). Selon le poète, Zéphyr, le vent d’ouest, tomba amoureux de Chloris, l’épousa et lui offrit comme dot un jardin perpétuellement en fleurs. Ovide raconte également comment Flora aurait aidé Junon à concevoir Mars sans l’intervention de Jupiter, grâce à une fleur magique qui permettait de devenir enceinte par simple contact (V.229-258).
Le rhéteur chrétien Lactance, au 4e siècle, propose une interprétation différente de l’origine du culte. Dans ses Institutions Divines (I.20), il affirme: «Flora, ayant acquis de grandes richesses par cette pratique [la prostitution], fit du peuple romain son héritier et laissa une somme fixe d’argent, dont les intérêts annuels devaient servir à célébrer le jour de sa naissance par des jeux publics, qu’on appela Floralia».
Des temples au service du peuple
D’après les sources archéologiques et textuelles, Flora possédait plusieurs lieux de culte à Rome:
- Un temple principal près du Circus Maximus, sur la pente inférieure de l’Aventin, quartier traditionnellement associé aux plébéiens. Ce temple fut construit suite à la consultation des Livres Sibyllins vers 238 av. J.-C.
- Un autre sanctuaire sur le Quirinal, dédié à Flora Rustica («Flora rurale»), qui pourrait correspondre à l’autel originel établi par Titus Tatius.
Ces emplacements soulignent le caractère populaire du culte de Flora, principalement célébré par la plèbe romaine plutôt que par l’aristocratie patricienne.
Le déroulement des célébrations
Les Floralia commençaient le 27 avril durant l’époque républicaine, ou le 28 avril dans le calendrier julien. Sous l’Empire, les festivités s’étendaient jusqu’au 3 mai, totalisant six journées de célébrations. Ovide évoque cette période charnière entre deux mois dans ses Fastes:
«Tu commences en avril et tu passes dans le mois de mai. L’un te possède quand il finit, l’autre quand il commence. Puisque les confins de ces mois t’appartiennent et te rendent hommage, L’un et l’autre conviennent à ta louange.» (Fastes, V.185-188)
Les festivités suivaient un programme structuré:
- Elles débutaient par des représentations théâtrales, les ludi scaenici
- Elles comprenaient des compétitions et spectacles dans le cirque
- Des danses et représentations mimiques animaient les journées et les nuits
- Les célébrations se concluaient par un sacrifice à Flora
Selon plusieurs témoignages, ces jeux se tenaient notamment dans un cirque spécial, appelé «cirque de Flore», situé hors de la ville, dans une vallée formée par le mont Viminal et le Pincio. L’empereur Galba y présenta même un éléphant funambule en 68 apr. J.-C., comme le rapporte Suétone (Vie de Galba, 6.1).
Des caractéristiques uniques et controversées
Une fête plébéienne aux mœurs libres
Les Floralia se distinguaient d’autres fêtes romaines par leur caractère populaire et leur ambiance décontractée. D’abord simples et naïves, ces célébrations évoluèrent vers des spectacles plus licencieux. Valerius Maximus relate une anecdote devenue célèbre: lors d’une représentation théâtrale pendant les Floralia, le public demanda aux actrices de se dénuder sur scène. Caton le Jeune, présent dans l’assistance, préféra quitter le théâtre plutôt que d’assister à cette exhibition ou d’empêcher le peuple de jouir de ces coutumes festives (Faits et Dits Mémorables, II.10.8).
Le poète Martial critique d’ailleurs l’hypocrisie de ceux qui, comme Caton, se rendent aux Floralia tout en feignant d’être choqués par ces spectacles: «Pourquoi es-tu venu aux joyeux rituels de Flora, aux plaisanteries festives et à la licence de la foule?» (Préface du livre I des Épigrammes).
La participation remarquée des prostituées
Selon plusieurs auteurs, les prostituées de Rome participaient activement aux Floralia. Juvénal mentionne qu’elles dansaient nues et se livraient même à des combats simulés: «Regardez ce qu’on peut voir pendant les jeux de Flora, où les prostituées […] combattent comme des gladiateurs» (Satires, VI.249-250).
Lactance, avec son regard chrétien critique, décrit ces spectacles en détail: «Outre la licence des paroles, où s’épanche toute l’obscénité, les femmes sont aussi dépouillées de leurs vêtements à la demande du peuple, et exécutent alors le rôle de mimes, et sont retenues sous le regard du peuple avec des gestes indécents, jusqu’à rassasier les yeux impudiques» (Institutions Divines, I.20).
Cette participation des prostituées aux cérémonies religieuses, malgré leur statut social marginalisé, témoigne d’une intégration partielle dans les traditions romaines.
Des rituels symboliques de fertilité
Les textes anciens décrivent plusieurs pratiques rituelles caractéristiques des Floralia:
- Ovide rapporte que des lièvres et des animaux appelés capreae (chevreuils ou chèvres) étaient libérés dans le cirque: «Pourquoi la foule porte-t-elle des torches ardentes? Pourquoi lâche-t-on des renards avec des torches attachées à leur dos? […] On lâche aussi des lièvres et des capreae aux jambes rapides» (Fastes, V.371-372).
- Selon le poète Perse, la foule était aspergée de pois chiches, symboles de fertilité: «Le peuple réclame les Floralia et le préfet, en tunique légère, jette des pois chiches à la plèbe en liesse» (Satires, V.177-178).
- Contrairement à d’autres fêtes comme la Cerealia où l’on portait des vêtements blancs, les Floralia se caractérisaient par des tenues multicolores, évoquant la diversité des fleurs printanières. Ovide confirme: «Ni le jour suivant ni celui d’après n’interdisent de porter des vêtements aux couleurs variées» (Fastes, V.355-356).
- Des célébrations nocturnes étaient organisées, avec des dispositifs particuliers pour éclairer les voies après les représentations théâtrales, comme l’indique Ovide: «Pourquoi la foule porte-t-elle des torches ardentes?» (Fastes, V.371).
Le rituel du Florifertum
Un rite particulier nommé Florifertum est mentionné par Festus, lexicographe romain du 2e siècle. Ce rituel consistait à porter (ferre) des épis de blé (spicae) dans un sanctuaire (sacrarium). Les spécialistes divergent sur la divinité honorée par ce rite (Flora ou Cérès) et sur sa date précise (27 avril ou 3 mai).
Réception et critiques
Les Floralia étaient organisées et financées de manière spécifique. Selon l’historien Scullard, les jeux étaient présentés par les édiles plébéiens et financés par les amendes collectées lors d’empiètements sur les terres publiques (ager publicus).
Cicéron évoque son propre rôle dans l’organisation de ces jeux: «Lorsque j’étais édile, je présentai des jeux en l’honneur de Flore» (Contre Verrès, II.5.36).
Les Floralia connurent un grand succès dans l’Empire romain. Introduites dans les provinces au fur et à mesure des conquêtes, elles furent particulièrement appréciées des peuples soumis en raison de leur caractère festif et décontracté.
À l’époque chrétienne, ces fêtes furent sévèrement critiquées. Outre Lactance, saint Augustin s’interroge: «Pourquoi serait-il plus satisfaisant d’irriter les dieux par la tempérance que de les apaiser par la débauche, et de provoquer leur haine par une vie honnête plutôt que de l’adoucir par une débauche si inconvenante?» (La Cité de Dieu, II.27).
La déesse Flora, par la voix d’Ovide, aurait sans doute répondu à ces critiques par cette simple maxime: «profitez de la beauté de la vie pendant qu’elle fleurit» (Fastes, V.353).
Sources antiques
Auteurs latins
- Augustin : De Civitate Dei (La Cité de Dieu), II.27.
- Cicéron : In Verrem (Contre Verrès), II.5.36.
- Festus : De verborum significatione (Sur la signification des mots), éd. W. M. Lindsay, Leipzig, 1913, p. 81.
- Juvénal : Saturae (Satires), VI.249-250.
- Lactance : Divinae Institutiones (Institutions Divines), I.20.
- Martial : Epigrammata (Épigrammes), Préface du livre I.
- Ovide : Fasti (Les Fastes), IV.946, V.185-190, 195-258, 329-330, 353, 355-356, 371-372.
- Perse : Saturae (Satires), V.177-178.
- Pline l’Ancien : Naturalis Historia (Histoire Naturelle), XVIII.286.
- Suétone : Vita Galbae (Vie de Galba), 6.1.
- Valerius Maximus : Facta et Dicta Memorabilia (Faits et Dits Mémorables), II.10.8.
- Varron : De Lingua Latina (La Langue latine), cité pour la référence aux divinités sabines.
- Velleius Paterculus : Historia Romana (Histoire romaine), I.14.8.
Sources épigraphiques
- Fasti Praenestini : calendrier romain conservé au Palazzo Massimo alle Terme (Rome), fragments concernant la période du 26 au 30 avril.
Études modernes
- Scullard, H. H. : Festivals and Ceremonies of the Roman Republic, Cornell University Press, 1981.
- Scheld, John : La religion des Romains, Paris, Armand Colin, 2002.
- Warde Fowler, William : The Roman Festivals of the Period of the Republic, Londres, 1908.
- Wiseman, T. P. : The Myths of Rome, University of Exeter Press, 2004.
- Turcan, Robert : The Gods of Ancient Rome, Routledge, 2001 (éd. originale en français, 1998).
- McGinn, Thomas A. J. : Prostitution, Sexuality and the Law in Ancient Rome, Oxford University Press, 1998.
- Latte, Kurt : Römische Religionsgeschichte, Leipzig, 1960.
- Le Bonniec, H. : Le culte de Cérès à Rome des origines à la fin de la République, Paris, 1958.
Dates
avril 27, 2024 - mai 2, 2024 (Toute la journée)