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202419marsToute la journée23Repeating EventQuinquatriaType:Fête romaine
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Ante diem quartum decimum Kalendas Apriles Statue de Minerve au Musée archéologique national de Naples (Photo
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EN BREF. Les Quinquatria, fête romaine célébrée du 19 au 23 mars, honoraient Minerve, déesse de la sagesse et de la guerre. Le premier jour, sans effusion de sang, commémorait sa naissance. Les suivants incluaient des combats de gladiateurs. Cette célébration réunissait écoliers, artisans et artistes sous la protection de la déesse. Les écoliers y prenaient leurs vacances tandis que les maîtres recevaient leurs honoraires. Une version mineure avait lieu en juin, avec des flûtistes déguisés en femmes.
Les Quinquatria: quand Rome célébrait Minerve, de l’école à l’arène
Au cœur du printemps romain, alors que les premiers rayons du soleil réchauffaient à nouveau la cité éternelle, se déroulait l’une des fêtes les plus populaires du calendrier religieux: les Quinquatria. Ces célébrations en l’honneur de Minerve, déesse de la sagesse, des arts et de la guerre, nous offrent une fenêtre sur la vie quotidienne des Romains, leurs croyances et leurs traditions.
Les Quinquatria (ou Quinquatrus) trouvent leur origine dans d’anciennes fêtes étrusques dédiées à Menrva (ou Menerva), la déesse étrusque des arts, de la sagesse et de la guerre, qui sera plus tard assimilée à la Minerve romaine et à l’Athéna grecque.
L’étymologie du nom a fait l’objet de débats parmi les auteurs antiques eux-mêmes. Selon Varron, grammairien et érudit romain du Ier siècle av. J.-C., le terme vient du fait que cette fête était célébrée le cinquième jour (quinque) après les Ides de mars: «Les Quinquatries: ce jour est célébré à cause d’une erreur sur le nom, comme s’il y en avait cinq. Il a été ainsi nommé parce que, de même que chez les Tusculans, le jour après le sixième jour des ides est appelé Sexatrus et le jour après le septième Septimatrus, de même ici, parce que c’était le jour après le cinquième jour des ides, on l’appelle Quinquatrus.» (De lingua latina, VI, 3, 3).
Ce terme peut également être interprété comme «les cinq nuits noires», en référence au calendrier lunaire romain et à la position de cette fête par rapport au cycle de la lune.
À l’origine, les Quinquatria ne duraient qu’un seul jour, le 19 mars, date à laquelle on plaçait traditionnellement la naissance de Minerve. C’est ce que confirment les anciens calendriers religieux romains qui n’assignent qu’un jour à cette fête.
Cependant, Ovide, dans ses Fastes (III, 3809-3810), mentionne clairement une célébration de cinq jours :
« Après un intervalle d’un jour, on célèbre les fêtes de Minerve qui tirent leur nom des cinq jours liés qui les constituent.»
Cette apparente contradiction s’explique par le fait que les Quinquatria furent étendus à cinq jours (du 19 au 23 mars) probablement à l’époque de Jules César, pour offrir plus de divertissements aux citoyens. Seul le premier jour était la fête proprement dite, les quatre suivants étant des extensions pour le plaisir du peuple.
Déroulement des festivités
Le déroulement des Quinquatria suivait une progression bien définie sur ces cinq jours, comme nous le rapporte Ovide dans ses Fastes (III, 3811-3815) :
«Le premier, on s’abstient de verser le sang, et il est interdit de croiser le fer: la raison en est que ce jour est celui de la naissance de Minerve. Le lendemain et les trois jours suivants, des jeux occupent l’arène plane: la déesse guerrière aime les épées dégainées.»
Plus précisément:
- Premier jour (19 mars) : journée pacifique sans effusion de sang, consacrée aux offrandes de fleurs, gâteaux et sel. Tous les professionnels dont le métier requiert l’intelligence venaient honorer la déesse de la sagesse dans son temple. Un taureau était sacrifié en l’honneur de Minerve.
- Deuxième au quatrième jour (20-22 mars) : jours consacrés à des combats de gladiateurs en l’arène pour honorer l’aspect guerrier de Minerve.
- Cinquième jour (23 mars): appelé tubilustrium, dédié à la purification des trompettes sacrées (tubae) utilisées dans les rituels guerriers.
Les protégés de Minerve
Une des particularités des Quinquatria était la diversité des groupes sociaux qui participaient aux célébrations. Dans un long passage des Fastes (III, 3815-3834), Ovide énumère les nombreux métiers et activités sous la protection de Minerve:
«Maintenant invoquez Pallas, jeunes garçons et tendres fillettes ! Celui qui se sera concilié Pallas deviendra habile.»
Parmi ces protégés de la déesse figuraient:
- Les écoliers et étudiants
- Les artisans du textile (fileuses, tisseuses)
- Les foulons (nettoyeurs de vêtements)
- Les teinturiers
- Les cordonniers
- Les charpentiers (comparés à Épéus, constructeur du cheval de Troie)
- Les médecins
- Les enseignants
- Les artisans d’art (ciseleurs, peintres, sculpteurs)
- Les poètes, dont Ovide lui-même qui invoque sa protection
Pour les écoliers, cette période était particulièrement importante car c’était un temps de vacances. C’est également à cette occasion que les enseignants recevaient leurs honoraires, appelés minerval ou mineruale munus (le don de Minerve), comme en témoigne Saint Jérôme dans ses Commentaires de l’épître aux Éphésiens.
Le temple de «Minerve Captive»
Dans la dernière partie de son évocation des Quinquatria, Ovide (Fastes, III, 3835-3848) mentionne un temple particulier, celui de «Minerve Captive» (Minerva Capta) situé sur les pentes du mont Célius à Rome:
«À l’endroit où le mont Célius descend en pente vers la plaine, là où la route n’est pas tout à fait plane, mais presque, on peut voir le petit temple élevé à Minerve Captive, temple dont la déesse a pris possession le jour de son anniversaire.»
Le poète propose plusieurs explications possibles pour ce surnom intrigant :
- Un jeu de mots avec capital (ingénieux)
- Une référence à sa naissance depuis la tête (caput) de Jupiter
- Un lien avec la capture d’une statue lors de la soumission des Falisques
- Une référence à la «peine capitale» pour les vols commis dans ce sanctuaire
Les historiens modernes retiennent généralement la troisième explication, qui ferait référence à une statue de culte ramenée comme butin de guerre après la conquête de la cité falisque.
Les Petites Quinquatries
En plus des grands Quinquatria de mars, les Romains célébraient également les «Petits Quinquatria» (Quinquatrus Minusculae ou Quinquatrus Minores) aux Ides de juin (13 juin). Cette fête secondaire était particulièrement dédiée aux Tibicines, la confrérie des joueurs de flûte qui participaient aux cérémonies religieuses.
La particularité de cette célébration était que ces musiciens défilaient vêtus de robes longues et travestis en femmes, dans une procession qui aboutissait au temple de Minerve sur l’Aventin.
Cette tradition commémorait un épisode de l’histoire romaine: suite à la suppression de certains de leurs privilèges, les flûtistes avaient fait grève et s’étaient retirés à Tibur (aujourd’hui Tivoli). Le Sénat, ayant absolument besoin d’eux pour les rituels religieux, chercha à les faire revenir. Les habitants de Tibur organisèrent alors une fête durant laquelle ils enivrèrent les musiciens, puis les placèrent dans un chariot qu’ils envoyèrent à Rome pendant leur sommeil. À leur réveil sur le forum, pour dissimuler leur honte, un censeur leur fit porter des robes et des masques féminins. C’est sous ce déguisement qu’ils reprirent leur service, et la tradition se perpétua ensuite chaque année.
Importance historique et politique
Au fil des siècles, les Quinquatria prirent une importance croissante dans le calendrier romain. Leur mention dans le Feriale Duranum, un calendrier religieux destiné au personnel militaire stationné à Dura Europos, montre leur diffusion dans tout l’Empire.
Certains empereurs vouèrent un culte particulier à Minerve et firent des Quinquatries une célébration majeure. C’est notamment le cas de Domitien (81-96 apr. J.-C.), qui était particulièrement dévot envers cette déesse. Suétone rapporte qu’il célébrait somptueusement ces fêtes dans sa villa d’Albano, où il avait institué un collegium (association) chargé de préparer des spectacles variés : chasses (venationes), représentations théâtrales et concours de poésie et d’éloquence.
Le Forum de Nerva à Rome, construit par Domitien, était d’ailleurs dédié à Minerve, et l’empereur avait également embelli l’ancien temple du mont Célio pour que les Quinquatria puissent y être célébrés avec plus de splendeur.
L’importance des Quinquatria est également attestée par des inscriptions trouvées aux quatre coins de l’Empire. En Hispanie, par exemple, une dédicace du médecin C. Attius Ianuarius, découverte dans l’ancienne Miróbriga, témoigne d’un acte de munificence pour la célébration de ces fêtes dans ce municipe.
Signification symbolique
Sur le plan symbolique, les Quinquatria s’inscrivaient parfaitement dans le cycle des saisons. Célébrées au moment de l’équinoxe de printemps, elles participaient aux rituels de renaissance printanière et marquaient le renouveau de la nature après l’hiver.
Le comparatiste Georges Dumézil a proposé un rapprochement entre les Petits Quinquatria de juin et un épisode mythique impliquant la déesse védique Ushas (déesse de l’aurore). Dans ce mythe, le dieu Indra vient châtier la déesse qui n’a plus la volonté nécessaire pour accomplir sa mission (faire advenir le Soleil, la belle saison) et la ramène à son devoir. Cette interprétation suggère une fonction cosmique de la fête, liée au cycle annuel et au renouveau saisonnier.
Sources antiques
- Ovide, Fastes, III, 3809-3848 (Ier siècle apr. J.-C.)
- Varron, De la langue latine, VI, 3, 3 (Ier siècle av. J.-C.)
- Suétone, Vie de Domitien, 4 (IIe siècle apr. J.-C.)
- Festus, De la signification des mots (IIe siècle apr. J.-C.)
- Saint Jérôme, Commentaires sur l’épître aux Éphésiens, 3, 6, 666
Dates
mars 19, 2024 - mars 23, 2024 (Toute la journée)