Cet événement se répètefévrier 5, 2026
202505févToute la journée17Repeating EventFORNACALIAType:Fête romaine
Description
EN BREF. Les Fornacalia étaient une fête romaine de février consacrée à la torréfaction
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EN BREF. Les Fornacalia étaient une fête romaine de février consacrée à la torréfaction du far (amidonnier). Chaque quartier (curie) célébrait à sa date, mais les retardataires se rattrapaient le 17 février lors de la Fête des Sots. Cette tradition révèle une Rome archaïque où l’on divinisait même les fours domestiques pour éviter de brûler le grain!
Les Fornacalia, fête des fours et du pain dans la Rome antique
Les Fornacalia étaient une fête religieuse romaine célébrée chaque année en février, généralement du 5 au 17 du mois. Contrairement à la plupart des célébrations romaines qui avaient lieu à date fixe, les Fornacalia étaient une fête mobile (feriae conceptivae) dont les dates variaient selon les décisions des autorités religieuses.
Le poète Ovide, dans ses Fastes, explique que «de nos jours, le Grand Curion fixe les Fornacalia par une proclamation légale, sans en faire une fête fixe; et tout autour du Forum, sur de nombreux écriteaux suspendus, une marque spéciale signale l’emplacement de chaque curie» (Fastes II, 527-530). Cette organisation particulière s’explique par la structure administrative archaïque qui présidait à la célébration.
Une organisation par curies
Les Fornacalia impliquaient les trente curies, les plus anciennes divisions administratives de Rome créées selon la tradition par Romulus lui-même. Chaque curie célébrait la fête séparément, à la date qui lui était assignée par le Grand Curion (Curio maximus), le chef des prêtres des curies.
Cette structure révèle l’ancienneté de la fête. À l’époque d’Ovide, au début de l’Empire, beaucoup de citoyens ne connaissaient plus leur curie d’appartenance, tant cette organisation était devenue obsolète. Le poète note avec ironie que «ceux qui, dans le peuple, sont des sots, ne connaissent pas leur curie, et accomplissent la cérémonie qu’ils reportent au dernier jour» (Fastes II, 531-532).
La «Fête des Sots»
Le dernier jour des Fornacalia, le 17 février, coïncidait avec les Quirinalia et portait le surnom populaire de «Fête des Sots» (Stultorum feriae). Cette appellation s’explique par le fait que les retardataires ou les citoyens qui ignoraient leur curie d’appartenance pouvaient rattraper leur participation ce jour-là.
Ovide raconte que ce même jour s’appelle aussi la Fête des Sots et précise que «ceux qui, dans le peuple, sont des sots, ne connaissent pas leur curie, et accomplissent la cérémonie qu’ils reportent au dernier jour». Cette situation reflète l’évolution sociale de Rome, où les structures archaïques survivaient comme des fossiles administratifs.
Le culte de Fornax, déesse des fours
La fête honorait Fornax, la déesse des fours et de la boulangerie. Le nom de cette divinité dérive directement du mot latin fornax (pluriel fornaces) qui désignait le four domestique. Ovide explique l’origine de ce culte: «Fornax devient une déesse: confiants en Fornax, les paysans la supplient de protéger leurs récoltes» (Fastes II, 525-526). Cette divinisation résultait des difficultés rencontrées par les premiers Romains dans la torréfaction des grains.
Le poète décrit les accidents fréquents: «tantôt en balayant, ils recueillaient des cendres noires en lieu d’amidonnier, tantôt les flammes ravageaient même leurs huttes» (Fastes II, 523-524). Face à ces dangers, les Romains créèrent une divinité protectrice spécialisée dans la maîtrise du feu culinaire.
Un rituel de torréfaction de l’amidonnier
Le cœur de la célébration consistait en la torréfaction rituelle de l’amidonnier (far), la céréale de base de l’alimentation romaine primitive. Ovide précise que «les anciens semaient l’amidonnier, moissonnaient l’amidonnier, et l’amidonnier récolté, ils l’offraient en prémices à Cérès» (Fastes II, 519-520).
Cette opération technique était délicate: «instruits par l’usage, ils le confièrent aux flammes pour le torréfier, mais, par leur propre faute, subirent de nombreux dommages» (Fastes II, 521-522). La torréfaction permettait de séparer le grain de sa balle très adhérente et facilitait ensuite le broyage au pilon.
Dimension familiale et collective
Les Fornacalia comportaient deux niveaux de célébration. Dans le cadre familial, chaque maisonnée procédait à un sacrifice devant son four domestique, suivi d’un repas où la farine constituait l’élément principal. Cette dimension privée soulignait l’importance du foyer comme centre de la vie domestique.
Au niveau collectif, les membres de chaque curie se réunissaient sur le Forum, dans un emplacement spécialement désigné et identifié par des affiches. Ils y apportaient leur amidonnier pour le faire griller collectivement et procédaient à des sacrifices communs sous la direction du curion de leur circonscription.
Attribution traditionnelle à Numa
La tradition romaine attribuait l’institution des Fornacalia au roi Numa Pompilius, le deuxième roi légendaire de Rome, réputé pour avoir organisé la religion romaine primitive. Pline l’Ancien mentionne cette attribution dans son Histoire naturelle.
Cette attribution s’inscrit dans la tendance romaine à faire remonter les institutions religieuses les plus anciennes aux premiers rois, particulièrement à Numa, présenté comme le législateur religieux par excellence.
Une fête de transition saisonnière
Les Fornacalia s’inscrivaient dans le cycle des fêtes de février, mois consacré à la purification et à la préparation du renouveau printanier. Pour les Romains primitifs, qui faisaient commencer le printemps vers le 17 février, cette fête marquait un prélude aux semailles plutôt qu’une célébration de la moisson passée.
Elle formait un pendant avec les Fordicidia du 19 avril, créant ainsi un cycle agraire complet. Ces deux fêtes, impliquant toutes deux les curies, encadraient la période cruciale des activités agricoles printanières.
Persistance historique
Les Fornacalia témoignent d’une remarquable longévité. Célébrées depuis l’époque royale selon la tradition, elles perdurèrent jusqu’à l’époque chrétienne tardive, puisque l’auteur chrétien Lactance les mentionne encore au 4e siècle.
Cette persistance s’explique par l’enracinement profond de la fête dans les nécessités techniques et économiques de la société romaine. Même après l’introduction des boulangers professionnels au début du 2e siècle avant notre ère, qui marqua la fin de la boulangerie exclusivement domestique, la célébration conserva sa signification religieuse et sociale.
Un témoignage sur la société romaine archaïque
Les Fornacalia offrent un aperçu sur la Rome primitive, où l’agriculture dominait l’économie et où chaque geste technique s’accompagnait d’un encadrement religieux. Elles illustrent aussi l’évolution sociale de Rome: une institution archaïque liée aux curies survit à l’époque impériale, mais sous forme de fossile administratif que beaucoup de citoyens ne comprennent plus.
Cette fête révèle enfin le processus romain de divinisation des forces techniques: face aux dangers de la torréfaction, les Romains créent une divinité spécialisée, Fornax, qui personnifie et maîtrise la puissance redoutable du feu domestique.
Sources antiques
- OVIDE, Fastes, II, 475-638.
Lux quoque cur eadem Stultorum festa vocetur
accipe: parva quidem causa, sed apta, subest.
Non habuit doctos tellus antiqua colonos: (515)
lassabant agiles aspera bella viros.
Plus erat in gladio quam curvo laudis aratro:
neglectus domino pauca ferebat ager.
Farra tamen veteres iaciebant, farra metebant,
primitias Cereri farra resecta dabant: (520)
usibus admoniti flammis torrenda dederunt,
multaque peccato damna tulere suo;
nam modo verrebant nigras pro farre favillas,
nunc ipsas ignes corripuere casas.
Facta dea est Fornax: laeti Fornace coloni (525)
orant ut fruges temperet illa suas.
Curio legitimis nunc Fornacalia verbis
maximus indicit nec stata sacra facit:
inque foro, multa circum pendente tabella,
signatur certa curia quaeque nota, (530)
stultaque pars populi quae sit sua curia nescit,
sed facit extrema sacra relata die.
- PLINE L’ANCIEN, Histoire naturelle, XVIII, 2.
- LACTANCE, Institutions divines, I, 20, 35.
- VARRON, De la langue latine, VI, 13.
- FESTUS, s.v. Quirinalia, Stultorum feriae.
Dates
Février 5, 2025 - février 17, 2025 (Toute la journée)