Ludus duodecim scriptorum – les sources littéraires

Ovide

Art d’aimer, III, 364-365 (Ier s. avant notre ère)

Est genus, in totidem tenui ratione redactum
Scriptula, quot menses lubricus annus habet:
Parva tabella capit ternos utrimque lapillos,
In qua vicisse est continuasse suos.

Traduction (Itinera Electronica)
Il est un autre jeu, divisé en autant de cases qu’il y a de mois dans l’année; la table contient trois pièces de chaque côté: pour gagner, il faut les ranger toutes les trois sur la même ligne.

Pline l’Ancien

Histoires Naturelles, XXXVII, VI, 2 (Ier s.)

Ergo tertio triumpho, quem de piratis, Asia, Ponto gentibusque et regibus in VII volumine operis huius indicatis M. Pisone M. Messala cos. pr. k. Octobres natali suo egit, transtulit alveum cum tesseris lusorium e gemmis duabus latum pedes tres, longum pedes quattuor – ne quis effetas res dubitet nulla gemmarum magnitudine hodie prope ad hanc amplitudinem accedente, in eo fuit luna aurea pondo XXX (…)

Traduction (Itinera Electronica)

À son troisième triomphe, où il triompha des pirates, de l’Asie, du Pont, des nations et des rois énumérés au septième livre de cet ouvrage, et qu’il célébra sous le consulat de M. Pison et de M. Messala, la veille des calendes d’octobre, le jour anniversaire de sa naissance, Pompée fit passer sous les yeux des Romains un échiquier [plateau de jeu] avec ses pièces, fait de deux pierres précieuses, large de trois pieds, long de quatre (et pour qu’un ne doute pas que la nature s’épuise, car on ne voit aujourd’hui aucune pierre approchant de cette grandeur, j’ajouterai que cet échiquier portait une lune d’or du poids de trente livres); (…)

Pétrone

Satiricon, XXXIII (Ier siècle)

Ut deinde pinna argentea dentes perfodit: « Amici, inquit, nondum mihi suave erat in triclinium venire, sed ne diutius absentivos morae vobis essem, omnem voluptatem mihi negavi. Permittetis tamen finiri lusum ». Sequebatur puer cum tabula terebinthina et crystallinis tesseris, notavique rem omnium delicatissimam. Pro calculis enim albis ac nigris aureos argenteosque habebat denarios.
Interim dum ille omnium textorum dicta inter lusum consumit, gustantibus adhuc nobis repositorium allatum est cum corbe, in quo gallina erat lignea patentibus in orbem alis, quales esse solent quae incubant ova.

Traduction (Itinera Electronica)

«Mes amis, nous dit-il, en se farfouillant la mâchoire avec un cure-dent d’argent, il ne m’était pas agréable de me mettre sitôt à table, mais plutôt que de vous retarder par mon absence, je me refuserais tout plaisir. Me permettez-vous pourtant de finir ma partie?» Un esclave le suivait, en effet, avec un damier en bois de térébinthe et des dés de cristal. Je noterai ce trait, d’un luxe particulièrement raffiné: au lieu de pions blancs et noirs, il se servait de pièces d’or et d’argent. Tandis qu’en jouant il débite tout un répertoire de basses plaisanteries, le repas continue: on apporte sur un dressoir une corbeille, dans laquelle était une poule en bois sculpté, les ailes ouvertes et arrondies, comme si elle couvait.

Agathias le Scholastique

Epigrammes, 482 – Anthologie Palatine, IX, 482  (VIe s.)

Οὐτιδανοἱ μερόπων εἰ καὶ μέγα ῥέξαμεν ἔργον,
οὔτινος εἰς μνήμην δηρὸν ἐπερχόμεθα
οἱ δ᾿ἀγαθοὶ κἢν μηδέν, ἀναπνεύσωσι δὲ μοῦνον,
ὡς Λίβυς εἶπεν ἀνήρ, τοῦτ᾿ ἀδάμαντι μένει.
Δήποτε γὰρ Ζήνωνα, πολισσοῦχον βασιλῆα,
παίγνιον ἀφράστων ἐκτελέοντα κύβων,
τοίη ποικιλότευκτος ἓλεν θέσις, εῧτ᾿ ἀπὸ λευκοῦ,
τοῦ καὶ ὀπισθιδίην εἰς ὁδὸν ἐρχομένου,
ἐπτὰ μὲν ἓκτος ἔχεν, μίαν εἲνατος αὐτὰρ ὁ σοῦμμος
δισσὰς ἀμφιέπων ἷσος ἔην δεκάτῳ,
ὅς τε πέλει μετὰ σοῦμμον ἔχεν δύο μουνάδα δ᾿ἄλλην
ψῆφον τὴν πυμάτην ἀμφιέπεσκε δίδος.
᾿Αλλὰ μέλας δισσὰς μὲν ἐν ὀγδοάτῳ λίπε χώρῳ
καὶ τόσσας ἑτέρας ἐς θέσιν ἑνδεκάτην
ἀμφὶ δυωδέκατον δὲ διέπρεπον εἲκελοι ἄλλαι,
καὶ τρισκαιδεκάτῳ ψῆφος ἔκειτο μία
δίζυγες ᾿Αντίγονον διεκόσμεον ἀλλὰ καὶ αὐτῷ
ῖσος ἔμιμνε τύπος πεντεπικαιδεκάτῳ
ὀκτωκαιδεκάτῳ πανομοίϊος εἰσέτι δ᾿ἄλλας
εἶχεν διχθαδίας τέτρατος ἐκ πυμάτου.
Αὐτὰρ ἄναξ λευκοῖο λαχὼν σημήϊα πεσσοῦ
καὶ τὴν ἐσσομένην οὐ νοέων παγίδα,
τριχθαδίας ἀδόκητα βαλὼν ψηφῖδας ἀπ᾿ ἠθμοῦ
πύργου δουρατέου κλίμακι κευθομένῃ,
δοιὰ καὶ ἓξ καὶ πέντε κατήγαγεν αὐτίκα δ᾿ὀκτὼ
ἄζυγας εἶχεν ὅλας πρόσθε μεριζομένας.
Τάβλην φεύγετε πάωτες, ἐπεὶ καὶ κοίρανος αὐτὸς
κείνης τὰς ἀλόγους οὐχ ὑπάλυξε τύχας.

Traduction (Texte établi et traduit par Pierre Waltz e.a., Paris, Les Belles Lettres, 1928-2011)

Nous, hommes de rien, nous avons beau faire un chef-d’œuvre, nous n’entrons pour longtemps en aucune mémoire. Les grands, eux, peuvent ne rien faire, se bornant à respirer, selon le mot du Libyen, cela reste gravé dans le diamant. Un jour donc que Zénon, le souverain de notre ville, achevait sa partie de dés, jeu plein de surprises, voici le coup joliment calculé qui le perdit. Il avait les blancs et marchait à reculons, avec sept pièces sur le six et une seule sur le neuf. L’extrême case en comptait deux, même nombre que la dixième. Après l’extrême, deux encore; puis venait, solitaire, la dernière pièce dans la deuxième case. Mais voici que le noir en avait laissé deux à la huitième place et un nombre égal dans la onzième case. Au douze, on en remarquait tout autant, tandis que sur le treize ne se trouvait qu’une pièce. Une paire ornait l’Antigone, et pareille disposition se répétait sur le quinze. Au dix-huit, situation identique; puis c’étaient deux autres encore sur la quatrième case, en partant de la fin. Or le prince, qui de la blanche armée avait reçu les étendards et ne voyait pas le piège imminent, et de son cornet, coup imprévisible, lança trois dés et, par l’escalier caché de la tour de bois, il amena deux, six et cinq. Huit pièces aussitôt, jusque là groupées, se virent dédoublées, isolées. Fuyez tous le trictrac [jeu des Tables], puisque le souverain lui-même n’a pas su échapper à ses hasards irraisonnés.

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